Comment extraire l’ADN des échantillons de nos oiseaux?
Le sexage ADN des oiseaux est un processus relativement simple. A partir d'un échantillon biologique que l'on analyse dans le laboratoire, on peut dire s'il s'agit d'un mâle ou d'une femelle. En disant cela, on
Le sexage ADN des oiseaux est un processus relativement simple. A partir d’un échantillon biologique que l’on analyse dans le laboratoire, on peut dire s’il s’agit d’un mâle ou d’une femelle. En disant cela, on n’en sait pas plus que lorsque l’on lit le résumé d’un livre et non pas son contenu. Si l’on ouvre le livre sur l’analyse génétique, on verra qu’il a fallu des millions d’années d’évolutions, des dizaines d’années de recherche, deux prix Nobel et une équipe de travail pour arriver à déterminer le sexe de nos oiseaux à partir de l’envoi des échantillons. Dans ce post, nous allons vous montrer montrer quelques curiosités et déchiffrer les mystères qui gravitent autour du sexage moléculaire des oiseaux.
L’essentiel est invisible pour les yeux
Lorsque Saint-Exupéry écrivit cette phrase dans « Le Petit Prince », il semblait prédire la description de l’ADN que Watson et Crick firent dix ans plus tard et qui leur valut le prix Nobel.
Quand nous ne parvenons pas à différencier les mâles et les femelles par leur plumage ou leur taille, nous devons nous baser sur le patrimoine génétique pour réaliser le sexage moléculaire. L’ADN, ce code mystérieux qui résume notre histoire évolutive et détermine qui nous sommes, représente maintenant le joker qui nous permettra de déterminer le sexe des oiseaux. Notre travail dans le laboratoire de biologie moléculaire est de rendre visible « l’essence » et de déterminer si cet ADN appartient à un mâle ou à une femelle. Comment le faisons-nous? Tout d’abord, nous devons trouver une zone de l’ADN qui permet de différencier les mâles des femelles (grâce à un marqueur génétique) et nous devons être en mesure de voir ce marqueur pour assigner le sexe à l’échantillon.
Une usine d’ADN dans une goutte d’eau
Le marqueur génétique utilisé pour le sexage moléculaire est appelé CHD (une façon simple d’appeler le marqueur de la protéine chromohelicoïdale de liaison à l’ADN) et, comme on peut s’y attendre, on le retrouve dans les chromosomes Z et W. Sa fonction est similaire dans les deux chromosomes, mais le segment d’ADN trouvé dans chaque chromosome diffère par sa taille: grâce à cette différence nous avons besoin identifier les mâles des femelles sur le plan moléculaire. Les femelles présentent un « grand » fragment et un autre « petit » appartenant aux chromosomes Z et W (dans l’ordre), tandis que les mâles ont seulement des copies du « grand » fragment localisé dans les deux copies du chromosome Z, qu’ils portent.
Sachant que chaque cellule contient deux mètres d’ADN, que le fragment de CHD n’atteint pas le micromètre (un millième de millimètre) et que chaque échantillon contient des milliers de cellules comment pouvons-nous distinguer les « petits » fragments de CHD des « grands »? « grandes » tailles et « petit » des copies de CHD? C’est aussi difficile que de trouver une aiguille dans une botte de foin. Cela devient beaucoup plus facile, s’il ya a des millons d’aiguilles. C’est un peu ce que fait le laboratoire de biologie moléculaire en fabricant des millions de copies identiques des fragments de CHD de l’ADN de l’échantillon que nous recevons, dans un volume plus inférieur à une goutte d’eau. Le biochimiste américain Kary B. Mullis s’est penché sur la façon de le faire et sa découverte (appelée Réaction en Chaîne par Polymérase – ou PCR en anglais) lui a permis de recevoir le Prix Nobel de Chimie en 1993. Les PCR sont basées sur des cycles de température (chauffage et refroidissement à des températures et des durées contrôlées) et sont effectuées dans des appareils appelés thermocycleurs.
Ces « thermomixages » de l’ADN génèrent des millions de copies des fragments du marqueur CHD. Une fois la PCR terminéen, nous pouvons déterminer s’il y a dans cette quantié minime de liquide, des grands ou des petits fragments du marqueur CHD. On peut ainsi déterminer le sexe de toutes les espèces. On va alors injecter le résultat de la PCR à un milieu solide issu de l’agar (la même substance qui sert à fabriquer les oursons en gélatine) et l’on expose les molécules d’ADN a un champ électrique. Cette technique s’appelle l’électrophorèse et grâce à elle, on peut séparer les molécules d’ADN en fonction de leur taille (la taille dépend la charge électirque de ces molécules). On obtient le résultat suivant : les mâles présentent une seule bande d’ADN (grands fragments de CHD, tous du même gabarit) et les femelles présentent deux bandes (grands fragments + petits fragments de CHD).
Maintenant vous savez, que quand vous recevez un rapport de sexage moléculaire (sexage par ADN), cela est possible grâce au travail de deux prix Nobel et d’une équipe de professionnels et experts en biologie moléculaire, qui ont réussi à déterminer l’ADN de vos oiseaux sur un plateau de gélatine!